De retour dans une salle de retenue bien connue.

Stephane surgit dans cette salle, passablement enerve. Plus que l'idee de se retrouver coince dans une salle minable en compagnie d'abrutis assortis, c'etait le fait de se faire prendre qui l'enrageait. Lui, qui avait evite les flics pendant tant d'annees, qui avait reussi a dissimuler jusqu'a son nom et son visage, s'etait fait prendre comme un gamin la main dans le sac.

Enfin bon, ca ne sera pas la premiere fois qu'il se fera surprendre ainsi, mais il avait estime que ne pas tabasser le pion lui apporterait moins d'ennuis que de le reduire au silence. Cette derniere solution aurait de toute facon reveille la malediction. Et de nouveau il aurait a se cacher des autres.
Profitons de ces quelques jours ou on reste inconnu.

N'accordant pas meme un regard aux tables disseminees a travers la piece et passablement vandalisees, ni a l'autre eleve compagnon d'infortune, il se dirigea vers la fenetre pour voir si l'on pouvait couper a deux heures ici en se la coulant douce dehors.

Bin non. Ils ont tout prevu ici. Bon bin tant pis, plus qu'a attendre deux heures betement ici...

"Cherches pa, ça sert a rien d'se casser ... ils te prendront plus la tete après ..."

Mark connaissait tellement le reglement qu'il aurai tpu dire a quelles lignes se rapportait exactement ce probleme. Secher les heures de colles, comme le lui avait dit une fois la directrice, ca faisait partie de ce qui était nommé "une atteinte grave aux sanctions disciplinaires". L'autre regardait ostensiblement par la fenêtre, mais aucun pion n'était entré avec lui. Pourquoi ? Bon, autant remédier a cela.

"Ils t'ont rien donné a foutre ? ... ben ils vont venir te surveiller alors."

S'il n'avait aucun exercice a rendre, il aurait a rester dans cette salle pour un certain temps, sous le regard d'un boulet payé pour ça. Et donc Mark serait obligé de faire quelque chose. Peu engageant comme perspective.

*Va encore falloir se debrouiller pour esquiver les emmerdes ...*

[Desole pour le retard de ma reponse, j'ai des problemes avec ma connexion web]

"Donne quelque chose a foutre? Jsais plus... 'toutes facons comme c'est la premiere fois en plusieurs annees que je me fais coller, je sais plus comment ca marche..." grommela-t-il a l'autre prisonnier.

Il n'avait aucune envie de continuer a se mettre en danger en se faisant connaitre d'encore plus de personnes - personnes qu'il faudra abattre des le reveil de sa malediction - mais si il s'y connaissait question reglement, il y aurait peut etre un interet a continuer a discuter.

"Et y'a un pion qui va venir nous surveiller tu dis? Ca craint.J'vais encore passer une aprem' pourri; y'a pas un moyen d'y couper?" questionna-t-il, avide de renseignements.

[pas de probleme mec]

Ne pas savoir comment fonctionnaient les heures de colle ? Rien de plus simple pourtant. On se faisait chierr pendant deux heures avec un truc minable a foutre ou bien sans rien avoir le droit de faire, sous la surveillance d'un pion inutile.

"Imagine un désert ... rien à l'horizon ... ben les heures de colle c'est pareil, c'est chiant, c'est long et c'est vraiment tuant."

Mark se leva à la seconde reflexion de l'autre, non sans avoir remarqué l'hésitation passant dans les yeux du bonhomme.

"J'm'occupe de tout, bouge pas ... ca t'attirerait juste des emmerdes et je passerais pour un con."

Il sortit de la salle, et fut absent environ cinq minutes. Ensuite, il revint avec un morceau de papier sur lequel étaient griffonées de vagues inscriptions sur ce que devait faire Stéphane. Voyant cela, Mark apprit le nom de son compagno d'infortune.
Son role de délégué lui permettait de prendre ce genre d'initiatives, et il pouvait prétendre surveiller son compagnon sans qu'un pion se dérange. En tout cas, selon lui, la directrice ne serait peut-etre pas d'accord, mais ca, c'était pas important pour le moment.
Lorsqu'il rentra dans la salle, il grommela:

"C'est moi qui te surveille ... Fais s'qu'y a sur le papier ou pas, rien a foutre, sinon range le à la poubelle. Pas de pion, rien que nous deux et les futurs collés s'il y en a. J'te laisserai te casser un peu avant, mais pas trop non plus, sinon j'me f'rais engueler et je veux pas perdre le peu de choses que j'ai obenu."

Stéphane roula la feuille de devoirs en boule et la balanca vers la poubelle, puis s'assit en tailleur sur sa table maculée de griffures de stylos, et regarda droit dans les yeux son interlocuteur dans un air de défi:

"Pourquoi tu fais ca? Tu me connais pas, t'en as rien a tirer et tu risques gros. J'ai jamais vu personne qui aidait un inconnu pour rien, et les rares fois ou j'ai accepté c'qu'ils me proposaient, j'me suis fait rouler.
Te fous pas de moi. "

Il n'en revenait pas. Il avait vu maintes choses étranges ici, s'etait retrouvé perdu dans des évenements impossibles, mais là, soit le monde était tout simplement devenu absurde, soit l'autre type avait une idée derrière la tête, idée qui ne serait probablement pas du gout de Stéphane.

Mais cette fois-ci, il avait enfin l'impression de retrouver quelque chose d'a peu près normal, et savait comment réagir, du moins en théorie, chaque personne ayant eu des manières différentes de l'attaquer.

Mark sourit en voyant Stéphane rouler ses devoirs en boule pour les jeter dans la corbeille. C'était à chaque fois pareil, sauf avec quelques imbéciles, puis il se tourna un peu, pour faire plus ou moins face à son compagnon. Le défi, voila ce qu'il lisait dans les deux yeux enflammés du type. L'incompréhension aussi.

"Je te connais, pas, tu me connais pas, on se connait pas ... belle affaire. Et alors ? Faut bien que je joue mon role, nan ? A quoi ca sert un délégué si c'est pas pour sortir les autres de la merde ? Moi je risque rien tu sais Stéphane j'ai des droits ... que j'ai obtenus grâce à cette salle d'ailleurs !"

La peur ... non le doute plutôt, voilà ce qu'incarnait Stéphane. Le doute et la méfiance. Sans doute l'héritage de son passé.

*J'devrais faire psy moi ...*

"Les risques, y 'en a quasiment aucun, et au moins comme ca je pense pouvoir compter sur toi une fois ou les choses seraient inversées. On sait jamais."

"Mouais" répondit Stéphane, toujours pas satisfait de la réponse apportée. Il garderait un oeil sur ce type, ses explications n'avaient pas l'air sincères... trop vagues, trop faciles.

"Et en attendant, on fait quoi pendant ces putains de deux heures dans ce trou?" questionna-t-il a tout hasard, pour voir si l'autre prisonnier etait aussi creux que ses informations, ou s'il avait un peu de suite dans les idées.

Toujours en tailleur sur sa table, Stephane se retrouvait pour la premiere fois sans rien a faire dans un lieu sans surprises. Et il enrageait toujours de s'etre fait betement prendre; si au moins la punition avait pu se dérouler dehors...

*Pas l'air convaincu le type*, estima Mark en voyant sa réaction à des explications pourtant correctes.

Il sourit tranquilement, à la question de son interloctueur. Toujours la meme chose: qu'est-ce qu'on fait ? Une reponse si simple, si evidente ...

"Eh ben on se fait chier, on dort, on parle, on fume ou autres choses, mais ici ..."

Il se déplaça et alla ouvrir la fenêtre, avant de s'appuyer au rebord, regardant dehors. Il déplaça ensuite une chaise, et s'assit sur le rebord de la fenêtre, là où il avait mis ses mains peu de temps auparavant, les pieds sur une chaise. Ensuite, s'appuyant sur les barres métalliques empêchant toute chute -une nouveauté, soit dit en passant-, il alluma une clope.

"Oh superbe. Je n'en attendais pas moins de cette prison." conclua-t-il d'un ton railleur. De toutes facons, ca serait difficilement pire que le reste du temps passé dans ce trou à rats.

Il se leva alors et inspecta les tables - toutes plus délabrées les unes que les autres - , puis s'approcha de la fenêtre ouverte, regarda la hauteur de la pièce par rapport au jardin dehors, et annonca d'un ton neutre:

"Il t'arrives quoi comme malheurs si je me barre?"

"T'as jamais connu pire qu'ici ? T'es vraiment un veinard alors. Il s'agit d'une prison dorée mec, pas d'un cachot humide. Les oubliettes, c'est pas ici."

Mark sourit en voyant l'autre jauger la hauteur de la fenêtre.

"J's'rais toi, je sauterais pas ... pas bon pour la santé ce genre de connerie, à trois mètres ca va, mais au troisième étage, pas cool du tout. Et j'aurais plus d'ennuis si tu sautais que si tu partais par la porte tout simplement."

Son sourire disparut.

"Mais, si tu te casses, moi je peux pas te couvrir. Et mes malheurs seraient inexistants par rapport aux tiens mec, pasque non seulement Shella te prendrait la tête, mais moi j'accepte pas qu'on se défile lorsque je me casse le cul pour quelqu'un."

"Te fous pas de ma gueule." aboya-t-il sèchement."Tu connais pas ma vie, et tu peut vivre l'enfer sans passer par la prison."

Mais il ne pouvait briser les autres arguments, et, vaincu, se résigna au silence.
Il était évidemment impossible de sauter par la fenêtre, et il était tout aussi impossible de descendre en s'aidant de la maconnerie comme prises d'escalades - idée tordue mais qui avait le mérite d'être imprévisible. Néanmoins, si cela marchait lorqu'il fallait éviter de se faire prendre par des policiers, ca n'apporterait pas grand-chose ici. Et puis c'était diablement difficile.

Ne pouvant absolument rien faire et étant condamné à passer deux heures avec l'autre idiot qui se complaisait dans ses airs supérieurs ne réussit qu'à enrager Stéphane, qui passa sa colère en frappant une table du poing, et ne réussit qu'à abîmer un peu plus le mobilier déjà très délabré, et se blesser la main - ce dont il se fichait.

Puis il se rassit sur une table près de la porte et loin de l'imbécile et, contenant sa rage, se résolut à attendre que cela fut fini.

*Pourquoi pensent-ils tous que quoi que ce soit dans leur vie puisse m'interesser ?*

"Mec, t'as vécu comme t'as pu, j'en ai rien a branler, crois pas qu tes phrases à la con pourront me faire un quelconque effet. Des banalités comme ca, n'importe qui peut en sortir et pourtant, t'as pas l'air d'etre n'importe qui."

*N'importe quoi serait plus juste ...*

Les reactions de celui qu'il commencait à considerer comme un adversaire potentiel etaient plutot previsibles, pour quelqu'un comme lui. Sa clope tirait sur sa fin et il en tira une derniere longue bouffée, avant de faire un cercle avec la fumée.

*Youpi, qu'est-ce qu'on delire ici ...*

Lorsque l'autres s'istalla le plus loin possible de lui, Mark éclata de rire, puis il ne s'occupa plus de lui. Un clochard silencieux c'est toujours mieux qu'un boulet qui parle.

Stéphane se tint coi, le regard aggressif et le goût amer de la honte et de l'échec dans la bouche.
Il haïssait cet imbécile aux manières moqueuses et paternelles, qui disait ne rien avoir à foutre de sa vie et qui disait vouloir l'aider.
Il s'était fait humilier par sa propre bêtise dans une joute verbale à laquelle il ne comprenait pas grand-chose, sinon que l'autre avait utilisé sa méfiance et sa méconnaissance des choses pour mieux le railler et continuer à jouer au grand frère tout en gardant son petit air méprisant. En fin de compte, il s'était fait mener par le bout du nez pour se faire jeter dans les orties sans difficulté.

Et, acculé, ne pouvant plus se défendre et ne pouvant pas lui imprimer sa face dans le sol -malédiction...- il réfréna sa rage et resta assis contre le mur, à attendre la fin des deux heures.